Toujours plus à l’est

Le jour du 3 décembre 2007 par Philippe

Le lendemain est une journée cours, courses et route. C’est aussi pour nous l’entrée dans la Slovaquie de l’Est où se mêlent aux slovaques les minorités ruthènes et roms. Nous sommes surpris par la densité de population de cette région où chaque vallée est occupée par une petite ville avec bien sûr les inévitables barres d’immeubles, héritage du passé communiste qui marquera sans doute longtemps ces pays.
Au hasard de notre route, nous croisons les premiers villages en grande partie habités par les roms.
J’aurai du mal à retranscrire le choc que nous avons ressenti en voyant l’état de misère dans lequel vivent ces personnes. Personnellement, je ne pensai pas qu’il existait de tels bidonvilles chez nous en Europe et tout ce que j’avais pu lire sur le sujet ne m’avait pas préparé à ça : masures faites de tôles et de bois au milieu des ordures où jouent des multitudes d’enfants dans le froid et la boue pendant que le long de la route, les adultes tirent des chariots sur lesquels s’entassent des sacs (de charbon ? de nourriture ?). Des images qui pourraient venir d’Inde d’où sont arrivés les roms il y a si longtemps.

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De l’autre coté des villages, quelques maisons relativement cossues sont habitées visiblement par des slovaques. Les deux communautés semblent s’ignorer.

Même s’il existe des points de ressemblance entre ce qui se passe ici et en France, la misère de la communauté rom est sans aucune comparaison avec ce que vivent les gitans par exemple. Cela n’est pas seulement du à la pauvreté générale de la Slovaquie où à l’importance de la minorité rom (400 000 personnes ; 7 % de la population) en Slovaquie orientale. Mais contrairement aux pays occidentaux, les régimes communistes ont forcé les roms à se sédentariser en les installant dans des logements de type HLM et en leur imposant un travail comme pour le reste de la population. Les roms, à l’inverse de ce qu’espérait le gouvernement, ne se sont pas intégrés dans la population ont continué à vivre entre eux. Si bien qu’avec l’effondrement du communisme, le travail n’étant plus obligatoire, ces personnes n’ayant aucune formation, étant déscolarisés très tôt et le plus souvent illettrés, le taux de chômage dans la communauté rom atteint aujourd’hui les 70%. Dans certaines régions, il est de 100%. Dans l’expérience communiste, les roms ont donc perdu leur mode de vie et leur savoir faire essentiellement basé sur l’artisanat individuel. Aujourd’hui, les quelques blocs HLM en ruines sont cernés par bidonvilles, la population misérable et analphabète, isolée par la langue et continuant à s’accroître à la manière des peuples du tiers monde.

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Quelques photos prises discrètement du camping-car…

Nous publions avec hésitation les photos des villages rom car nous nous sommes sentis très mal à l’aise en les prenant, même si je les ai faites rapidement, sans cadrer et sans montrer que nous photographiions. Traverser ces villages a été une expérience très choquante pour tous et nous avions le coeur serré de voir dans quelle situation étaient tous ces gens, et notamment ces nombreux enfants.
Le choc a été plus important qu’en Russie car nous y avions vu des personnes âgées en détresse mais pas des enfants, et pas en aussi grand nombre.

Evidemment, la sédentarisation forcée a renforcé cet état de misère. Un ami croisé lors de mon dernier passage à Saumur m’a fait une remarque frappante à propos de notre voyage, remarque que je rumine depuis. Evoquant le paradis perdu et le péché originel de la bible, il l’a associé à la sédentarisation de l’homme. Je dois dire que la situation dramatique dans laquelle vivent les roms de Slovaquie apporte de l’eau à sa théorie.

Notre destination est Bardejov, ville du Nord de la Slovaquie où nous espérons pouvoir visiter quelques églises en bois, fierté du peuple ruthène, communauté parlant une langue très proche de l’ukrainien et écrivant en cyrillique mais de religion catholique uniate, sorte de pont entre l’église catholique (ils reconnaissent l’autorité du pape) et l’orthodoxe pour l’esthétique, le mariage des prêtres et le baptême par immersion.

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